Découvrez l’homélie du 18 août 2024 par l’abbé Alexandre Marie ROBINEAU
Homélie
20ème dimanche du T.O. – 18 août 2024 – La Faute/Carmel/Cathédrale
Chers frères et sœurs bien-aimés de Jésus Christ, (croix, Ste Hélène, en parler – en chaire avant de partir…)
Le Livre des Proverbes nous invite à « quitter l’étourderie pour vivre, en prenant le chemin de l’intelligence » ! Beau programme pour ce dimanche de vacances ! Et bien sûr cela parle de l’intelligence de la foi, de l’intelligence du cœur, ce que n’est pas l’intellectualisme qui est sec, froid et vide, plein d’idéologie et non pas de vie ! « Ne soyez pas insensés… soyez plutôt remplis de l’Esprit Saint » nous dit St Paul. Et cela pour nous conduire à l’Evangile et la suite du discours du Pain de Vie de Jésus. L’Esprit Saint qui nous pousse, nous dit St Paul, à célébrer, à chanter le Seigneur, à l’action de grâce et à la louange. Ce que nous vivons chaque dimanche à la messe, le cœur de notre vie, de notre semaine. J’aimerai vous parler de l’intelligence de la foi liée à la croix pour vivre la vérité de l’eucharistie, notamment dans l’action de grâce.
1/ L’intelligence de la foi
Chers amis, notre foi chrétienne est intelligible. Elle est en partie rationnelle et raisonnable. De part l’orientation que donne la vie éternelle, la foi appelle à une conduite responsable pour tendre vers ce qui est beau, vrai et bien, pour choisir ce qui fait grandir, pour vivre l’amour dès maintenant afin de le goûter pleinement au Ciel. Pas de fuite dans les nuages mais le Ciel pleinement présent dans le réel de l’aujourd’hui ! St Paul insiste : « Frères, prenez bien garde à votre conduite : ne vivez pas comme des fous, mais comme des sages ». Quand le monde et les hommes perdent la boussole de l’espérance chrétienne, ils deviennent fous… La vie n’a plus de sens. Les repères se dissolvent et disparaissent. Plus rien n’a de goût ni de saveur. On se raccroche à l’éphémère et au fugace, et à la première croix ou épreuve, on s’écroule, on se révolte, on explose en s’éclatant. « Génération désenchantée ; tout est chaos ; rien a de sens et rien ne va ; quand la raison s’effondre, à quel saint se vouer » disait, dans les années 90, la grande théologienne Mylène Farmer !!
Comme le disent certains philosophes athées, il n’y a aujourd’hui presque que l’Eglise catholique pour redire et rappeler l’importance de la raison, du raisonnement humain, de cette intelligence rationnelle qu’il faut travailler et développer, tout en la mettant en lien avec la vérité divine. C’est ce que rappelaient avec force Jean-Paul II aidé du Cardinal Ratzinger dans l’encyclique Fides et ratio, foi et raison, en 1998 : « La foi et la raison sont comme deux ailes qui permettent à l’esprit humain de s’élever vers la contemplation de la vérité ». Il y a donc cette nécessité impérieuse, chers amis, de retrouver le chemin de l’intelligence de la foi pour conduire notre vie ici-bas sous le regard du Seigneur, tendu vers les réalités du Ciel, comme la fête de ND de l’Assomption nous le rappelait jeudi dernier. Et cette intelligence de la foi, cette science de la foi, cette théologie, littéralement cette parole sur Dieu, passe par la croix, par le mystère pascal, le passage par excellence où brille la lumière de la vérité… Car un moment la raison laisse place et la foi prend le relais. Et là se joue la liberté intime de chacun : j’y crois ou pas ? Je fais confiance ou non ? Et Dieu dans son amour pour chacun, respecte cette liberté. Dans son livre « La science de la croix », Ste Edith Stein, quelques mois avant de mourir à Auschwitz, disait : « Le grand mystère que constitue la liberté de la personne, c’est que Dieu lui-même s’arrête devant elle ». Oui, chers amis, Dieu est amour et il se donne par amour jusqu’au bout. Depuis le jour de la crucifixion et chaque jour dans la messe…
2/ La croix et l’eucharistie
C’est la réponse d’amour de notre Dieu à nos questions, à nos pourquoi, à nos indifférences, à nos infidélités et à nos lâchetés : il vient au milieu de nous se donner par amour pour nous afin de nous ouvrir le Ciel un peu plus chaque jour si nous le suivons et si nous l’accueillons…
Le pain existe pour être mangé, pour nourrir et soutenir la marche et le poids du jour de chaque personne, de chaque pauvre que nous sommes… Et Dieu, Jésus, se fait Pain de vie, Pain vivant, Pain descendu du Ciel.
La foi eucharistique est la clef de voûte de notre foi : cela tient tout le reste ! Enlevez l’eucharistie, et tout s’écroule ! De même, enlevez la croix et rien ne tient ! Pas d’eucharistie sans la croix ! Pas de discours du Pain de vie, pas de Dernier Repas, de Dernière Cène, sans la passion, la mort et la résurrection de Jésus !
La vie passe par la croix, par le don d’amour sur la croix. L’eucharistie et la croix sont intimement liées. C’est inséparable ! C’est l’unité. C’est la communion. C’est son sens le plus profond : « qui mange ma chair et boit mon sang demeure en moi et moi en lui », et il nous faut demeurer dans cette communion…
Seule la foi chrétienne authentique ouvre une porte par la croix du Christ, et c’est la seule ouverture possible dans ce monde clos. C’est ce que disait St Jean-Paul II dans les premiers mots de sa première encyclique en 1979 : « Le Christ rédempteur de l’Homme est la clef du cosmos et de l’histoire ». Vertige du mystère de la croix où l’amour se donne et donne sens à tout le reste… Même l’Ancien Testament n’ouvre pas encore cette porte de la croix et de la résurrection, sur cette lumière qui éclaire la souffrance et le chemin de souffrance…
Chers amis, il nous faut poser et répondre chacun à cette question : est-ce que je crois que la souffrance, le chemin de la croix peut devenir un chemin de vie ?
Et en fait, il n’y a pas d’autre chemin pour la vie que le chemin de la croix ! Quoiqu’il arrive, il faudra y passer à un moment ou à un autre… Et tous ceux qui veulent faire croire le contraire sont des menteurs, des charlatans, des marchands d’illusions…
Le Pape François, dans sa première homélie comme pape, le 14 mars 2013, disait : « enlever la croix de Jésus et vous transformez l’Eglise en gentille ONG et plus rien n’a de sens dans la foi chrétienne » ; la lumière de la croix est nécessaire pour éclairer la souffrance et ouvrir le chemin de la vie. Et cela se vit d’abord et avant tout dans chaque eucharistie, dans le mystère pascal du Christ qui se donne par amour. Ce Pain de vie, la chair du Christ, conduit à la Vie éternelle, et cela dès ce monde présent. Oui, chers amis, pas de foi sans la croix ; pas de vie sans la croix. C’est la vie de l’eucharistie, le chemin du Pain de vie. C’est là l’intelligence de la croix : scandale pour les juifs, folie pour les païens ! Sagesse des chrétiens ! Sagesse de l’amour qui se donne. Et cela doit nous conduire à rendre grâce sans cesse.
3/ L’action de grâce
La croix ne doit pas être morbide, culpabilisante, triste ou terrifiante. Après avoir caché la mort partout, on veut maintenant, même dans certaines écoles catholiques, cacher les croix avec Jésus dessus car ça ferait peur aux enfants… c’est surtout les adultes qui ont peur, et qui n’ont plus la foi donc ni les mots pour expliquer avec joie et foi la croix de Jésus, chemin de vie et de résurrection, car chemin de l’amour de Dieu qui se donne et qui sauve…
St Paul insiste : « à tout moment et pour toutes choses, au nom de notre Seigneur Jésus Christ, rendez grâce à Dieu le Père » ! Voilà l’attitude de base, essentielle et fondamentale, d’un chrétien responsable, vivant vraiment l’intelligence de sa foi : c’est de rendre grâce à Dieu ! L’attitude de la gratitude !
On a le choix comme les disciples qui écoutent Jésus et son discours du Pain de Vie : soit on réagit comme certains (que nous entendrons dimanche prochain) qui disent : « cette parole est rude ! qui peut l’entendre ? » Et Jean de préciser : « beaucoup de ses disciples s’en retournèrent et cessèrent de l’accompagner » ;
Soit, nous disons avec Simon-Pierre « Tu as les paroles de la vie éternelle… Nous croyons et nous savons que tu es le Saint de Dieu »… Il faut choisir… ou lâcher Jésus… ou le suivre et alors le louer, lui rendre grâce… « Chantez le Seigneur et célébrez-le de tout votre cœur » dit encore Paul.
C’est le sens de l’eucharistie : rendre grâce ! C’est le sens de la liturgie, le sens du mot « laudes », la prière du matin. Comme il faut cultiver sa foi eucharistique, il faut aussi cultiver une vraie culture de la louange et de l’action de grâce. Et cela se manifeste notamment dans la beauté qui touche l’âme et le cœur, la beauté de la liturgie et des chants, qui va au-delà de l’explicite et exprime ainsi la joie du cœur qui s’émerveille…
Ne nous habituons pas à la messe et à la folie de l’eucharistie ! Ne nous lassons pas de louer et de rendre grâce à Dieu à tout moment… Notamment dans les moments éprouvants, dans l’obscurité de la foi et les difficultés de la vie, prenons l’habitude de toujours rendre grâce à Dieu, car c’est là que le cœur sera alors ouvert et que Dieu pourra faire des miracles par sa grâce, au-delà de nos espérances et de nos demandes… le miracle de la croix, le miracle de la gratitude, le miracle de l’eucharistie et du Pain de Vie…
Demandons à la Vierge Marie de nous aider à savoir rester avec elle, au pied de la croix, avec foi et espérance, pour goûter le Pain de Vie, son Fils, notre Sauveur, en rendant grâce à Dieu à tout moment et en toute chose… JVSM. Amen.
Abbé Alexandre-Marie ROBINEAU +