HOMÉLIE
Chers frères et sœurs bien-aimés de Jésus Christ,
Demain, c’est formidable, c’est la rentrée !! N’est-ce pas les enfants ?? et les grands ? Joie de retourner à l’école, joie de retourner au travail, joie de l’automne qui arrive (ça ne changera pas beaucoup avec l’été qu’on a eu…). Bref, joie !! N’est-ce pas ? Vous voyez, soit on subit et c’est pesant, soit on choisit avec joie et tout est grâce, même la rentrée !! Il s’agit de tout vivre en s’offrant, en se donnant, comme le Christ, avec le Christ et pour le Christ ! C’est le sens de la Parole de Dieu de ce dimanche. C’est le sens de la vie chrétienne et de toute la vie baptismale ! Et j’aimerai vous en parler ce matin en vous parlant de sacrifice et de sacerdoce, de culte véritable et la nécessité d’être missionnaire.
1/ Sacrifice et sacerdoce (théologie et bible)
Il faudrait un cours entier sur ce sujet passionnant avec des notions souvent mal comprises, mal vues et trop mises de côté. Il est important d’avoir une perception juste et chrétienne de cela, en lien avec la Parole de Dieu qui en parle explicitement mais aussi implicitement. On a trop souvent donné une connotation négative au terme de sacrifice, en comprenant celui du Christ, comme une obligation en vue d’arrêter la colère du Père, comme quelque chose d’imposée de l’extérieur. En oubliant l’idée première de se sacrifier par amour…
Et si vous êtes bien attentifs, vous attendrez souvent ce terme de « sacrifice » dans les prières eucharistiques… et particulièrement dans votre réponse au prêtre dans la nouvelle traduction : « Que le Seigneur reçoive de vos mains ce sacrifice… » ! Mot qu’on a voulu supprimer il y a 50 ans et encore maintenant, tout comme le terme de « sacerdoce », comme le demande Loïc de Kérimel dans son livre « En finir avec le cléricalisme » qui n’a absolument rien compris à la profondeur du mystère chrétien… Et en même temps, le piège est subtil… Ce qu’il faut déjà bien comprendre c’est que le Christ inaugure une réalité nouvelle sans supprimer la réalité existentielle, humaine, incarnée et ancienne. Et il faut toujours garder à l’esprit ce triptyque essentielle : nouveauté, continuité, accomplissement. Le Christ n’est pas venu abolir la loi mais l’accomplir. Et le Christ prend en compte le fait que l’homme soit profondément religieux, qu’il soit juif ou païen, et que l’expression de cette religiosité s’exprime principalement par le sacrifice et donc par une forme de violence
Ce qui rend sacré, c’est le sacrifice, et celui qui fait le sacrifice, c’est celui qui a le sacerdoce, c’est-à-dire le prêtre.
Et le seul Grand Prêtre qui nous sauve (cf. la Lettre aux Hébreux) c’est le Christ qui n’offre pas un sacrifice extérieur mais qui s’offre lui-même en sacrifice d’amour et qui invite à le suivre et à l’imiter : « Si quelqu’un veut marcher à ma suite, qu’il renonce à lui-même, qu’il prenne sa croix et qu’il me suive ». Et St Paul de préciser : « Je vous exhorte à présenter votre corps en sacrifice vivant, saint, capable de plaire à Dieu ». C’est on ne peut plus clair : il faut se sacrifier soi-même par amour !
Dans les Evangiles et chez St Paul, le Christ n’est jamais appelé « prêtre » et on ne fait jamais mention explicitement de son sacerdoce. Ce n’est le cas que dans la Lettre aux Hébreux et dans le Livre de l’Apocalypse. Car il fallait trancher et se démarquer avec les conceptions du sacerdoce et des sacrifices de l’Ancienne Alliance. Mais il en parle implicitement en étant appelé l’Agneau de Dieu, en parlant de l’offrande de sa vie, de porter sa croix, etc. C’est pourquoi les premiers chrétiens évitent aussi ce terme de sacerdoce. Ils vont le reprendre assez vite au IIème siècle en lien avec l’approfondissement du sacrifice eucharistique car il aura fallu un peu de temps pour articuler la nouveauté du sacrifice et du sacerdoce du Christ, avec sa continuité par rapport à la Loi ancienne et toute la religiosité humaine. Du temps aussi pour le vivre dans l’Eglise et chez les Anciens, les presbytres et les épiskopoï, les évêques, successeurs des Apôtres. Le seul prêtre c’est le Christ. Le seul sacrifice qui nous sauve une fois pour toute c’est le sacrifice de la croix du Christ qui nous ouvre le chemin de la résurrection et du Ciel. Mais le Christ nous invite à participer et à collaborer à son sacrifice et à son sacerdoce, et cela à 2 niveaux : à un niveau existentiel pour chaque baptisé, qui est prêtre, prophète et roi, et à un niveau vocationnel pour chaque prêtre et pasteur ordonné au Christ Tête et au service de son Corps qu’est l’Eglise. Et c’est ainsi, chers amis, qu’il faut vivre le vrai culte et le vrai sacrifice : s’offrir et se donner.
2/ le culte véritable : s’offrir et se donner (liturgie et prière)
C’est là tout l’enjeu : comment je vis mon baptême et ma vie chrétienne ? Est-ce que ma vie est vraiment, chaque jour, chaque instant, un sacrifice d’action de grâce, une offrande d’action de grâce pour Dieu qui m’a créé, qui m’a donné son souffle de vie, qui m’a racheté, qui a souffert et est mort pour moi, et qui est ressuscité pour me sauver du péché, de la mort et de l’enfer ? Le Christ qui est mort pour que je vive !
Si on vient à la messe, c’est pour ça ! Pour s’offrir ! D’où le moment si important de l’offertoire ! Ce n’est pas seulement donner une piécette ou un billet de 500 ! Je donne ce que j’ai et je me donne avec le Christ au Père dans l’Esprit ! Le pain et le vin, c’est toute ma vie, tout ce que je suis. Toute ma vie doit être sur la patène et dans le calice ! « C’est la juste manière de lui rendre un culte » : s’offrir !
Et donc vous voyez bien que cela embrasse toute la vie, et pas seulement l’offertoire, et pas seulement le temps de la célébration liturgique de la messe ! Toute ma vie doit être sans cesse offerte : et quand je me lève la nuit car mon bébé pleure ou qu’un enfant est malade, quand patiemment j’entends la complainte de mes collègues, quand, de manière cachée, je rends service, quand je visite un voisin malade et âgé, quand je réponds aux appels de mon curé pour aider et me donner dans le service et la vie ecclésiale, etc. Je m’offre et je me donne ; je me sacrifie par amour et dans la joie d’être sauvé : alors je rends le culte véritable du sacrifice d’action de grâce, et, à travers moi, par moi, Dieu par sa grâce qui peut agir, transforme le monde et les cœurs en quelque chose de plus beau, de plus juste, de plus vrai !
Prenons un exemple et une image : ceux qui participent à la reconstruction de Notre-Dame de Paris : les tailleurs de pierre, les charpentiers, les vitraillistes, etc. Je suis intimement convaincu que même s’ils n’étaient pas payés, ils feraient quand même ce chantier qui leur tient tellement à cœur, car cela est une participation à quelque chose de plus grand qui les dépasse, qui est historique, qui marque le temps et l’espace, et même inconsciemment, cela répond à un appel intérieur vital profond. Il se donne pour quelque chose de plus grand qui donne sens et beauté à leur vie, à leur travail, à leur savoir-faire, à leur cœur !
Nous sommes faits pour cela, chacun selon ses dons, ses talents, son appel, sa vocation : participer à l’œuvre de salut de Dieu, en s’offrant avec le Christ ; en laissant le Christ s’offrir sans cesse au Père en nous, par notre vie, par le don de nous-même. « Transformez-vous en renouvelant votre façon de penser pour discerner quelle est la volonté de Dieu : ce qui est bon, ce qui est capable de lui plaire, ce qui est parfait ». Si nous voulons gagner le monde entier (le pouvoir, les richesses, les plaisirs désordonnés, le succès, etc.) nous perdrons notre vie ! Et notre temps ! et notre âme ! Mais qui perd sa vie, qui offre et donne sa vie avec le Christ et pour le Christ, la trouvera et la sauvera ! Satan et la pensée mondaine exprimée par Pierre refusent la croix, refusent le vrai amour qui se donne, refusent le vrai culte car ils sont autocentrés et veulent sauver leur peau !
Comme le prophète Jérémie, laissons-nous saisir par l’amour de Dieu pour nous offrir avec le Christ, et cela afin de devenir de vrais missionnaires de l’amour. Car il ne faut pas seulement se donner pour une grande et belle église de pierres mais aussi pour l’Eglise de pierres vivantes que le Christ continue d’édifier…
3/ Tous missionnaires de la charité ! (Pastorale et mission)
C’est le thème de notre année pastorale : « Tous missionnaires de la charité », sous le patronage demain et mardi de Ste Mère Teresa de Calcutta, et à l’école de Ste Thérèse de Lisieux, copatronne des missions.
Selon notre appel propre, nous devons être disciple missionnaire. Et ça commence, par exemple, par inviter quelqu’un demain soir au cinéma pour découvrir la belle figure de Mère Teresa : quelqu’un peut-être de non-pratiquant, non-croyant, éloigné, et qui peut être touché et ainsi commencer un chemin…
Le Seigneur pourrait faire sans nous mais il ne veut pas faire sans nous. Il veut que nous participions à son œuvre de salut, et que nous l’aidions à faire grandir son amour dans le monde ! Il faut foutre le feu chers amis ! Être des pyromanes du feu de l’amour du Seigneur autour de nous !
Il faut que chacun soit une étincelle puis une flamme de l’amour divin afin d’embraser le monde et que nos frères se laissent embrasser par le Christ ! Cela dépend de chacun de nous ! Si vous voulez vous préserver, vous sauvegarder, vous protéger, vous allez perdre votre vie ! Si vous vous offrez avec Jésus, par amour et dans la joie, le Seigneur va faire des merveilles et il va multiplier les miracles de guérison intérieure, spirituelle, humaine, relationnelle. Miracles invisibles et pourtant si nombreux et si précieux !
Demandons à la Vierge Marie de nous aider à offrir notre vie avec son Fils par amour, selon la volonté du Père.
Abbé Alexandre-Marie ROBINEAU +
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BIOGRAPHIE
René Girard, est né en Avignon le 25 décembre 1923, ancien élève de l'Ecole des Chartes, a fait toute sa carrière universitaire aux Etats Unis comme professeur de littérature comparée. Il a enseigné dans plusieurs universités américaines, notamment à John Hopkins University (de 1957 à 1968 et de 1976 à 1980) et à Stanford University (de 1980 à 1995), où il a terminé sa carrière comme professeur émérite. Il a été élu à l'Académie Française en décembre 2005.
Il est l’inventeur de la théorie mimétique qui, à partir de la découverte du caractère mimétique du désir, a jeté les bases d’une nouvelle anthropologie. Il se définit lui-même comme un anthropologue de la violence et du religieux.
Le premier livre de René Girard, Mensonge romantique et vérité romanesque, publié en 1961, met au jour les ressorts du « désir triangulaire », à travers une approche de grandes œuvres romanesques (de Cervantès à Proust). Ses intuitions sur le « désir mimétique » lui permettent d’élaborer une anthropologie comparée des grandes formes du religieux archaïque : la question du mécanisme victimaire fait ainsi l'objet de son second livre, La Violence et le sacré, publié en 1972.
Dans Des Choses cachées depuis la fondation du monde (1978), il entreprend, en récapitulant les grands acquis de sa recherche, d'exposer pour la première fois la puissance inspiratrice des textes bibliques dans son travail d'anthropologue. Ses ouvrages ultérieurs approfondiront les thèmes essentiels de sa recherche en faisant une lecture anthropologique de l'Ancien et du Nouveau Testaments (Le Bouc émissaire, La Route antique des hommes pervers, Je vois Satan tomber comme l'éclair, etc) mais aussi du théâtre de Shakespeare en 1990 (Les Feux de l'envie).
En 2007, René Girard ouvre une quatrième étape de son travail, avec Achever Clausewitz : il y démontre que la théorie mimétique peut devenir une clé décisive pour interpréter les phénomènes de la violence contemporaine.
René Girard est décédé à Stanford le 4 novembre 2015.
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